Inversons les rôles (partie 4)




"Mon père a tué plusieurs fois ma mère. Et il a fait la même chose à ma sœur; moi, il n'a jamais essayé de me tuer. Mais il m'a violé et torturé de toutes les manières possibles. Il a pris son pied en tuant toutes les femmes de la famille" Asia Argento 

Ce matin, je me réveille à 7h30, nous sommes un lundi.  Je m'appelle Julie et j'ai 26 ans. Je vis dans un grand appartement à Versailles, et je sais que la femme de ménage va passer vers 9h, comme chaque jour afin d'entretenir mon logement. Je me dirige vers la cuisine afin de me préparer un smoothie avec des fruits rouges et me manger un petit-déjeuner copieux, mais équilibré.

Je suis doctorante en Histoire, ma thèse porte sur le rôle des femmes au cours de la Révolution française, ces grandes oubliées de l'Histoire, comme par exemple Olympe de Gouges, qui a fini sur l'échafaud en voulant faire entendre sa voix en tant que citoyenne. Il faudra attendre encore 150 ans pour que les femmes aient le droit de vote! 

J'ai grandi dans une famille plus qu'à l'aise financièrement, car mes parents étaient des marchands d'art, et comme le dit l'expression, je suis bien née. C'est pour cela que je ne m'en fais pas trop pour mon avenir, et un poste d'enseignante-chercheur en université m'ira très bien une fois ma thèse terminée.  Mes mes parents étaient... Car ils sont morts il y a de cela huit mois dans un accident de voiture tandis qu'ils se rendaient à Cabourg au Grand Hôtel, comme pour chacun de leurs anniversaires de mariage. Ironie du sort de mourir alors que l'on souhaite juste fêter un évènement heureux, n'est-ce pas? 

Alors, certes, ils m'ont laissé une immense fortune dont je n'aurais sans doute pas assez de dix vies pour tout dépenser, mais, depuis, je suis très triste et un peu paumée. Je me sens aussi très seule dans cet immense appartement, car je suis fille unique. 

Je commence à me préparer, mais aujourd'hui, j'apporte un soin particulier à ma tenue vestimentaire, car j'ai un rdv Tinder. Cela fait quelques semaines que j'ai décidé de m'inscrire sur cette application afin de peut-être rencontrer un gars qui saura m'aimer pour autre chose que pour mon fric, comme ces petits dealers de cité que j'ai à un moment fréquenté, par exemple. 

Je me souviens par exemple de Kevin, un sale petit con qui ne faisait que me  quémander du pognon alors qu'il avait déjà une gonzesse en prime! Elle s'est d'ailleurs bien retrouvée dans la merde à cause de lui, mais cela nous a vachement rapproché Christelle  et moi, et c'est cette mésaventure qui m'a permis de me faire une nouvelle amie dont je suis aujourd'hui très proche. Mais bon, toujours est-il que je n'ai toujours pas de keum à l'heure actuelle quoi! 

Je suis dans mon dressing, hésitant entre une robe de chez Sandro ou un ensemble tailleur-jupe de chez Maje. Ce sera la robe qui l'emporte, pour le tailleur, je trouve qu'il fait un peu trop entretien d'embauche. Je l'enfile par-dessus mon ensemble Aubade, et des bas coutures de chez Cervin. Oh, je sais que je ne ferais rien le premier jour, surtout que mon rencard a eu la délicatesse de me proposer un déjeuner, au lieu d'un diner, afin de ne pas me mettre la pression de coucher le premier soir. Des bottes Valentino, un carré Hermès et un sac Chanel viendront assortir ma tenue. Je me sens jolie ainsi, sure de moi. 

Cette fois-ci, j'ai choisi un homme plus âgé, car j'ai envie de quelqu'un de stable. Il m'a dit qu'il avait 38 ans, et qu'il était divorcé, sans enfants. Qui sait? Ce sera peut-être le bon? 

Je passe en premier lieu à la fac, afin de donner un cours à des 1ère années. Je suis aussi chargée de travaux dirigés, ce n'est pas un job qui paye très bien, mais cela me permet déjà de mettre un pied à l'étrier en ce qui concerne l'enseignement auquel je me destine. Et puis, j'avais des choses à prouver, car, lorsque j'ai été acceptée comme doctorante, mon maitre de thèse m'a regardé d'un air goguenard en me disant que j'étais trop jolie pour avoir un certain intellect, puis m'a rappelé que, vue la fortune de mes parents, je n'avais pas besoin de travailler, mais le Master II serait suffisant pour trouver un époux de ma catégorie socio-culturelle et briller en société. 

J'ai la chance d'avoir des étudiants studieux et appliqués, qui sont majoritairement des étudiantes d'ailleurs, puisque 70% des personnes qui accèdent aux études supérieures sont désormais de sexe féminin.

Je finis à 11h, donc je prend ma voiture pour me rendre dans ce fameux restaurant qui est celui des Révolutionnaires. J'apprécie l'attention qui n'est pas faite pour me déplaire. J'arrive sur place est le lieu est charmant. Je ne peux pas en dire autant lorsque mon hôte arrive, et les photos ne dévoilaient pas son embonpoint, puis on voit clairement qu'il s'est arrangé avec sa date de naissance. Son physique m'importe peu, mais son âge me choque tout de même. Là, on commence à avoir une belle différence! 

Il me propose de prendre une bouteille de champagne, je n'ai pas trop l'habitude de boire, mais pourquoi pas? Je décide de choisir une salade, par politesse, car je ne veux pas que cela lui revienne trop cher, bien que j'aurais les moyens de racheter l'établissement en entier. Mais il voudra sans doute m'inviter. 

Je file aux toilettes, afin de voir ce que me reflète le miroir, et je reviens à la table. Je n'aime pas du tout son air dédaigneux et sur de lui. Je finis ma coupe de champagne, et je commence à me sentir mal, cotonneuse. C'est étrange, je n'ai jamais été dans cet état-là, même après avoir fumé un ou deux pétards...

Il me pose sa main sur ma cuisse, mais je n'ai même pas la force physique de refuser. Je ne comprend plus ce qu'il dit, je balbutie juste que je veux rentrer chez moi. Il me prend par le bras, et je pense qu'il va m'appeler un Herbert, ou bien m'amener vers une station de taxi. Que nenni! 

J'ai un trou de mémoire, mais je me retrouve dans une chambre d'hôtel quelques minutes plus tard. Je me sens vraiment de plus en plus mal, mais je n'ai pas la force, ni de parler, encore moins de faire le moindre mouvement. Je me retrouve sur le ventre, je sens qu'il me déshabille, mais je n'ai pas la force de me lever, de lui dire non, de me défendre, de partir. 

Je sens qu'il me pénètre, mais je ne veux pas, non je suis certaine de cela, je ne veux pas, surtout pas comme ça! Je sens la douleur, je sens que mon corps tout entier rejette cette intrusion par derrière, et j'ai mal, que j'ai mal! Je tente de hurler, mais je n'arrive qu'à émettre ce qui ressemble à des borborismes. 

Tout mon corps n'est qu'une plaie, tellement je souffre, puis... C'est le trou noir. Je me réveille, j'ai comme une énorme gueule de bois, je grelotte, je m'aperçois que j'ai du sang entre les jambes à l'arrière, j'ai peur, j'ai froid, je me sens sale, très sale. Je peux aussi renifler l'odeur de son sperme, j'en ai des haut-le-cœur.

J'attrape mon portable dans mon sac, et j'appelle la seule personne qui sera apte à me comprendre, Zohra. Elle est escorte, elle a des idées féministes, et elle saura forcément me rassurer. Je l'appelle, je suis en larmes, 4 heures se sont écoulées depuis que j'ai rejoint mon bourreau au restaurant, mais j'ai pourtant perdu toute notion du temps. 

Zohra hurle dans le combiné, non par car elle est en colère après moi, mais elle est effarée par ce qui vient de se produire. Et moi, j'ai honte, j'ai tellement honte! Je lui dis que je veux rentrer chez moi pour me laver, elle m'explique que non, il ne faut pas! Il faut que je me rende à la police, qu'elle va m'envoyer sa cousine qui va me conduire au commissariat en voiture, je serais de toute manière incapable de prendre le volant ou de marcher.

Pourquoi la police? Parce qu'elle sait ce que je tais: ce que je viens de subir porte un nom, c'est un viol! Son adorable cousine et colocataire ne tarde pas à arriver et à m'aider à tenter de me rhabiller. Elle m'aide à marcher tant bien que mal jusqu'à son véhicule. Elle m'amène à l'hôtel de police, où on m'envoie une dame O.P.J afin de prendre ma déposition. Elle est très compréhensive et pleine de compassion, elle me confirme que je me suis faite violer. 

Elle m'envoie aussi à l'hôpital, au service de gynécologie d'urgence, où je me rend et où un gynécologue m'examine. Ses gestes ont beau être purement cliniques et rassurants, je vis très mal le relevé d'ADN ainsi que la constatation des lésions. il est outré par "ces salopards qui se permettent ce genre de choses sur une femme", et il me dit qu'il est de tout cœur avec moi, qu'il espère que cette enflure va payer et cher! Ses paroles et sa compréhension me font tout de même du bien. Il m'explique aussi qu'une contraception d'urgence n'est pas nécessaire, étant donné la nature de le pénétration, mais me délivre tout de même un traitement post-exposition, afin que je ne paye pas le prix du H.I.V en prime, ainsi qu'un antibiotique à large spectre pour les éventuelles I.S.T. Je ne serais pas exemptée pour autant de faire des dépistages d'ici quelques semaines. 

La cousine de Zohra me raccompagne jusqu'à mon domicile à Versailles, puis me prépare un thé dans la cuisine, dont elles ont le secret toutes les deux, plein de sucre, ce qui va m'apporter du réconfort. Une fois Hassana partie, j'appelle Christelle qui ne pourra pas passer ce soir, car elle bosse, mais elle viendra une fois son service fini pour dormir chez moi. Je lui laisse les clés dans le pot de fleur au cas où je m'endormirais, car elle finit tard. 

Il est 22h, je veux juste prendre une longue douche, foutre à la poubelle ces vêtements qui étaient censés me rendre belle, je leur en veux à eux aussi! Ils devaient juste m'aider à rencontrer l'homme de ma vie, ils m'ont fait passer pour une fille facile, une poupée qui ne sait pas dire non, un morceau de viande dont n'importe quel homme peut user à sa guise. 

Nous sommes un lundi, je m'appelle Julie, j'ai 26 ans, et aujourd'hui, j'ai subi un viol. Non, je ne me suis pas faite violer, car je n'étais certainement pas consentante pour cela, et les mots ont leur importance. 

Ce soir, je n'ai plus la force de rien, et je veux juste dormir de tout mon saoul; je ne vais pas aller sur le blog que m'a fait découvrir Zohra, celui de Chlotilde Rastignac, une consœur à elle dont j'aime bien le style incisif et parfois énervé. Si elle relatait mon histoire, appellerait-elle mon tortionnaire un connard ordinaire? 

A SUIVRE... 

Contact: chlotilderastignac91@gmail.com











 

Commentaires

  1. Message agent 054, mort à ces connards ordinaires, tous ne sont pas comme cela, ne laissons pas faire.
    Courage Mesdames, un connard peut être mais pas ordinaire 😪
    J'ai honte des fois d'être un homme...

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