5ème mot de mon jeu littéraire : argent (de Citron Jaune)

 

Mon livre en vente: Confessions d'une prostiputescorte par Chlotilde Rastignac • Achat en ligne avec Editions Maïa (editions-maia.com)

" La richesse est un voile qui couvre bien des plaies." Méandre.

Hier soir, au restaurant, quand je t'ai demandé, droit dans les yeux, de choisir un mot afin de contribuer à ce jeu, je n'avais aucune idée duquel tu allais choisir, mais je ne suis pas étonnée par ton choix, connaissant un peu à te connaitre. En effet, nous avons en commun d'appartenir chacun à une communauté, même si elle n'est pas la même, qui n'a pas de tabous avec l'argent. Et c'est étrange que tu m'ais sorti ce mot, car je comptais écrire un article sur le sujet, en rapport avec mon activité, donc j'aime autant te dire que je suis inspirée! 

Au commencement, lorsque l'Humanité a commencé à fonder des sociétés, il n'y avait pas d'argent, et le troc était de mise. Seulement, cet échange ne peut avoir lieu lorsqu'il n'y a que peu de produits disponibles. Tu peux échanger par exemple, un poulet comme une quantité de laine, et cette même quantité de laine contre 100 grammes de plantes médicinales. Mais, chez Auchan, ça deviendrait vite un enfer!

Ainsi, nos ancêtres ont alors inventé l'argent, puis à frapper monnaie. Pourquoi? Parce que le sociologue Pierre Bourdieu avait théorisé sur le fait que l'argent servait à canaliser la violence. En effet, lorsque tu souhaites un bien ou un service, que ce soit un croissant, une voiture, ou une heure de cours de sport, il te "suffit" de sortir des billets afin de l'obtenir. Ce ne fut pas toujours le cas, et c'est bien pour cette raison que les premières guerres eurent lieu, afin de s'approprier ce que le peuple d'en face  avait. Donc, oui, l'argent sert à canaliser la violence. 

Mais... Cet argent a une contrepartie, il faut pouvoir en avoir. Donc, il faut, pour la plupart d'entre nous, toi inclus, travailler. Tu sais d'où vient le mot travail? Du Trepalium, l'instrument dont on se servait du temps des Romains afin de contraindre l'esclave qui ne voulait pas effectuer les tâche qui lui étaient affectées. Ca en dit long sur ce qu'est le boulot, non? 

Et c'est bien là où je veux en venir avec toi, c'est que, comme je te le disais justement hier soir, "L'argent est un excellent serviteur, mais un bien mauvais maitre", et c'est une maxime que me disait souvent mon ancien meilleur ami.  Oui, certes, cet argent peut te permettre de passer un week-end à Arcachon avec une escorte en carton qui cherche les chiottes en priorité, cela peut te permettre d'acheter un collier de grande marque à une greluche, ou bien un parfum Louis Vuitton, certes. Mais, d'une part, quel est le prix à payer pour cet argent? De te transformer en esclave de tes propres encours? Attention! Ne te méprends pas, je te comprend, surtout depuis que je vis à Paris, nous passons tous notre temps ici à courir  après la maille, tellement la vie y est chère. Et puis, il est normal de vouloir  offrir à ta descendance la facilité là où nous avons du lutter comme des chiens de la casse pour acquérir ce que nous avons. 

Seulement, le fric n'achète pas tout non plus. Il n'achète pas l'amour qu'une femme peut porter à un homme, car, si elle l'aime vraiment, elle pourra prendre le bus avec lui, la Panamera ne sera pas un indispensable. Parfois, les gens se cachent un peu derrière la réussite socio-économique afin d'user de la politique de l'autruche... Parce que la vie offre aussi d'autres choses, comme l'amour, le bonheur, mais aussi des plaisirs simples qui ne nécessitent pas ou peu de blé. Je ne sais pas si tu seras d'accord ou pas avec moi... Ne te méprends pas, je ne te montre pas du doigt, car je suis un peu faite du même bois que toi sur ce sujet, je te l'ai déjà dit. 

Et ta réussite, c'est un peu beaucoup ce qui fait que j'ai de l'admiration pour toi, je te l'ai déjà dit. Parce que, de là où tu viens, rien n'était acquis. Je n' en dirais pas plus ici, mais, quand on te connait, les gens qui se plaignent tandis qu'ils ont tout eu dès la naissance donnent envie de leur parler de ta situation... 

Par contre, dans le cadre de mon activité, je suis un peu moins sympathique, et tu es le premier à le savoir, même si tu n'as jamais cherché toi-même à être un de ceux qui tentent de gruger de ce côté-là. Je me souviens d'un matin où j'avais gravement la tête dans le cul, et j'avais un tant soi peu zappé THE enveloppe, tu me l'as mise dans mon sac en me disant "Un contrat est un contrat". Mais tous ne sont pas ainsi. 

Ils ne veulent pas comprendre qu'en payant, les hommes ont la paix. Quelle paix? Celle de ne pas avoir à se préoccuper de la vie de celle avec qui ils ont partagé un moment pour un temps donné, de ne pas être confronté à une femme qui pourra se montrer jalouse, de pouvoir choisir sur catalogue, de ne pas avoir à séduire, de  ne pas culpabiliser s'ils ne rappellent pas, ou en rappellent simplement une autre. Ce serait une hérésie de croire que je suis ainsi quand je ne suis pas Chlotilde Rastignac. Mais on voudrait le beurre, l'argent du beurre, le cul de la crémière, et le sourire du crémier. A savoir, avoir accès à tout ça, mais sans payer. Pensez-vous! 

Cela me sidère lorsque je lis ou j'entend des gars parler de "cadeau" lorsqu'on parle de la somme donnée. Non, moi je n'ai ni tabou, ni honte à parler de tarifs, ni d'honoraires. Tout comme vous ne faites pas un cadeau lorsque vous réglez un plombier ou un coiffeur, vous ne m'enfaites pas non plus!  J'ai, un jour, manqué de faire une crise d'épilepsie, tandis que je lisais un manque qui avait écrit: "Moi, je ne paye pas, j'aide". Pardon??? Le gars fait carrément l'aumône, quoi! Je ne crois pas, non! Je ne suis pas une mendiante, juste une travailleuse du sexe. Ce n'est pas un travail, comme je l'ai déjà aussi lu? AH... Sauf qu'il y a bien un code A.P.E et un code N.AF pour ce qui nous réunit ici. Donc, en tout cas, ça y ressemble. 

Oui, mais elles ne rencontrent jamais des hommes gratuitement? Oui, mais dans un cadre différent, et si et quand cela arrive, alors je ne suis plus Chlotilde Rastignac, je redeviens l'autre, avec tout ce que cela comporte... 

Et puis, pour avoir en face de vous une femme qui prend soin d'elle et qui va chez le coiffeur, et fait ses ongles, qui fait du sport... Ce n'est pas gratuit tout ça! Et il faut aussi que je m'achète de la nourriture, que je me loge, que je paye mes factures...  Ce qui me tue le plus, c'est lorsque certains gars s'énervent du fait de payer, comme on peut aussi parfois le lire. Selon eux, là encore, ce n'est pas respectable, et ce devrait être gratuit. En ce cas, allez dans un bar ou en soirée, et tentez d'avoir du gratuit, personne ne vous oblige à avoir recours au vénal. C'est dur hein? Finalement, c'est une facilité de payer, n'est-ce pas? Nous devrions faire cela gratuitement? Je ne pense que nous serions plus respectables aux yeux de certains, et le statut de salope n'est pas plus enviable que celui de pute pour ceux qui sont bas du front. Et le temps que je passe avec vous, je ne le passe pas pour faire autre chose, donc, comme le temps perdu ne se rattrape jamais, il me semble bien logique que je sois payée pour. Je n'attend pas un cookie, encore moins une médaille pour services rendus à la nation... Mais payez-moi ce que vous me devez! 

Et, comme hier soir, nous avons aussi parlé du WU Tang Clan, la musique de fin sera de ce groupe.

Contact: chlotilderastignac@gmail.com